« Je cherche à rendre une impression de réel et à faire vibrer l’oeil par la couleur » m’explique Rose Barberat, artiste peintre récemment diplômée des Beaux-Arts de Paris et invitée cette semaine sur Dans les yeux d'Elsa.

Le travail de Rose Barbarat est envoûtant et fascinant. Il faut se tenir face à ses immenses toiles pour le saisir pleinement. Si ses figures, composées principalement par son entourage proche que la peintre photographie, sont exécutées de manière très réalistes, elles évoluent désormais dans des espaces dépouillés, synthétiques, où la couleur enveloppe tout. Elle devient sujet, décor, ressenti et elle guide la composition d’une atmosphère précise, gommant tout sur son passage. Nous sommes alors projetés dans un espace temps affranchi de toutes notions temporelle où ses motifs empruntent autant au réel qu’à la mythologie. Ainsi sa narration fictive laisse libre les impressions et interprétations du regardeur. 

Si son travail s’apparente au monochrome, Rose Barberat renouvelle cette technique historique. Ses veloutés, ses nuances, donnent beaucoup de profondeur et offrent une dimension tactile à ses œuvres. 

Avec Rose nous avons échangé sur son processus créatif, son rapport à la figuration et la couleur. Un échange très intéressant que je suis heureuse de vous partager aujourd'hui.

Peux-tu te présenter ?

J’ai 27 ans, je suis peintre diplômée des Beaux-Arts de Paris depuis juillet 2021.


" Je peins d’après des photographies que je réalise parce que cherchant un mode de représentation réaliste j’ai besoin d’un support. "

Rose Barberat
 La Mine de diamants, huile et acrylique sur toile, 220 x 180 cm  © Romain Darnaud
La Mine de diamants, huile et acrylique sur toile, 220 x 180 cm © Romain Darnaud
Tu travailles sur des toiles de grandes dimensions et tes personnages prennent des proportions importantes voire parfois de géants (comme ceux que j’ai pu admirer à ton atelier qui était en cours de réalisation). Si leurs proportions et parfois leurs représentations, comme Le Cyclope, s’affranchissent du réel, tes personnages sont souvent pleinement contemporains (par leurs vêtements, allures) et très réalistes. Peux-tu nous dire quelque mot sur ton travail de figurations ? La photographie intervient-elle dans ton processus créatif?

Je considère la peinture figurative comme un moyen de créer des images. La peinture est une voie très directe et physique pour y parvenir, c’est pourquoi jouer avec l’échelle me paraît intéressante. Cela me permet de créer un impact, de reproduire ce rapport très physique que j’éprouve en créant.
Le rapport à la photographie est en effet important pour moi car elle entretient avec la peinture ce rapport à l’image, donc à la séduction qu’elle exerce pour l’oeil.
Je peins d’après des photographies que je réalise parce que cherchant un mode de représentation réaliste j’ai besoin d’un support. Mais encore, je me rends compte que le velouté que je trouve dans la photographie, ce moment présent, et le rapport immédiat à la deux dimensions me touchent beaucoup.
Je pense que c’est pour cela aussi que mon travail pictural est orienté vers la fiction et s’autorise l’introduction de détails fantastiques parce qu’avec la photographie je suis déjà dans un mode d’interprétation et d’appropriation.
Quant au rapport au monde contemporain il est simple, je pense qu’il faut vivre avec son époque. C’est finalement ce que signifie le mot représentation à mon sens.

Tes personnages, centraux dans tes travaux, évoluent souvent dans des espaces intérieurs dépouillés. Car même si tes personnages sont imposants, tu accordes une grande part aux espaces vides autour d’eux. Peux-tu nous en parler?

Ces espaces vides correspondent souvent aux aplats que je réalise sur la surface de la toile. Comme je travaille sur la réception et l’impact de la couleur sur nos perceptions, c’est un moyen de la donner à voir.
Je pense que le vide me permet de synthétiser et de mettre en valeur ce que je voulais représenter dans l’image comme une rencontre ou un portrait.
Le progrès, 2021, huile et acrylique sur toile, 200 x 160 cm
Le progrès, 2021, huile et acrylique sur toile, 200 x 160 cm
Tu sembles travailler par série de camaïeu. Tu as travaillé dans les camaïeux de jaunes-oranges, de bleus et désormais tu travailles dans des camaïeux de rouge. Ces différents « filtres » colorés sont-ils pour toi une façon de sublimer la réalité ?

Je cherche à rendre une impression de réel et à faire vibrer l’oeil par la couleur. Je ne vois pas la couleur comme un filtre parce que je travaille avec une matière colorée : ce n’est pas un dessin que je recouvre d’un glacis coloré.
Mais, il est vrai que travailler de manière monochromatique en employant des couleurs vives augmente une impression qu’on peut avoir d’un événement, d’une image et le plaisir de l’oeil. La couleur oriente beaucoup la contemplation et l’interprétation.
Le monochrome est aussi un topos récurrent dans l’histoire de l’art. Comment le réinventer, comment en parler et quel monde est-ce qu’il redéploie sont des questions qui m’intéressent.

Les camaïeux, la façon dont tu représentes tes motifs (le gâteau qui tournoie dans « Un couvre feu ») ou encore la juxtaposition d’espaces différents qui se côtoient dans une même composition (Le Mirador) confère à tes peintures une dimension onirique . Est-ce qu’elle que chose que tu recherches?

Je pense que cela peut donner cette impression. Pourtant, je ne travaille pas autour de l’inconscient et l’interprétation des rêves.
Je travaille beaucoup plus à partir d’intuitions, de sixième sens et de manière empirique : une peinture en amène une autre. Je pense que je cherche d’autres possibles.
 Un contre-feu, huile sur toile, 200 x 200 cm
Un contre-feu, huile sur toile, 200 x 200 cm
Tes camaïeux de bleus me rappellent beaucoup ceux de Jacques Monory. Est-il une reference pour toi dans ton travail? As-tu d’autres references artistiques à nous partager?

Oui, Monory est un peintre que j’aime beaucoup, il a exploré un type de représentation figurative qui me parle beaucoup, très littéraire. Je trouve aussi qu’il a produit une oeuvre explorant les enjeux de la couleur et sa réception.
La Terre brûlée, huile et acrylique sur toile, 250 x 210 cm
La Terre brûlée, huile et acrylique sur toile, 250 x 210 cm
Le Solstice d’Eté, 2021, oil and acrylic on canvas 220 x 180 cm - 86.5 x 71 in.
Le Solstice d’Eté, 2021, oil and acrylic on canvas 220 x 180 cm - 86.5 x 71 in.
L'Avenir, huile et acrylique sur toile, 210 x 180 cm
L'Avenir, huile et acrylique sur toile, 210 x 180 cm
 Le Planétarium, 2021, oil and acrylic on canvas, 220 x 180 cm - 86.5 x 71 in. / Photo © Gregory Copitet
Le Planétarium, 2021, oil and acrylic on canvas, 220 x 180 cm - 86.5 x 71 in. / Photo © Gregory Copitet
Un coup de soleil I, 2018⁠
Un coup de soleil I, 2018⁠
Pensées, huile sur toile 250 x 180 cm
Pensées, huile sur toile 250 x 180 cm
Le Styx, huile et acrylique sur toile, 220 x180 cm /© Romain Darnaud
Le Styx, huile et acrylique sur toile, 220 x180 cm /© Romain Darnaud
Après sa première exposition personnelle, "Planetarium" à la Galerie Pact, à Paris et pendant Art Paris, l'artiste a récemment exposé dans une exposition collective,  "L’Ecume des songes » à Poush Manifesto, un commissariat d’Hervé Mikaeloff, d’Elise Roche et d’Yvannoé Kruger.
Actuellement ses oeuvres sont présentées dans le cadre de la Fiac online. 
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