La galerie Elsa Meunier (Dans les yeux d’Elsa) est très heureuse de présenter la première exposition personnelle en France de l’artiste allemande Cécile Lempert.
Cette présentation de toiles inédites plonge le spectateur dans l’atmosphère familière et inquiétante des Nachtstücke de l’écrivain romantique E.T.A Hoffmann. Principale inspiration du cycle pour piano éponyme composé par Robert Schumann en 1839, ces contes nocturnes deviennent sous le pinceau de Cécile Lempert, des paysages crépusculaires, des archives intimes et des détails saisis dans les œuvres des maîtres anciens. On y croise le regard énigmatique du Garçon au chat de Renoir, dont la nudité vulnérable est dérobée à la vue ; un fragment d’autoportrait absent ou encore une nuit mélancolique remémorant Friedrich et Whistler. Ces images n’apparaissent pas immédiatement sur la toile brute, mais d’abord sous forme de modèles sculptés ou numériques, puis dans les flaques colorées de l’aquarelle. Réalisés à la détrempe, ses tableaux conservent la spontanéité et la légèreté de ces dessins primitifs. S’appropriant la technique du tüchlein des peintres germaniques du XIVe et XVe siècles, Cécile Lempert applique couche après couche de fins lavis qu’elle rehausse parfois au pastel. Laissant transparaître le grain de la toile, ses touches délayées révèlent le processus d’exécution du tableau. Le fantôme de son geste. A l’instar de Michael Borremans, Cécile Lempert use d’une palette sobre où les beiges et les bruns mates se mêlent aux tons plus sourds pour modeler le clair-obscur inquiétant de ses scènes nocturnes. Si ses tableaux ont souvent l’envergure d’écran de cinéma, ils adoptent ici le format plus intime de ses aquarelles. Ils conservent toutefois une dimension cinématographique avec leurs focus sur des visages aimés et leurs cadrages radicaux sur des scènes fictives. A l’exemple d’Alex Katz, l’artiste recourt également à un autre motif filmique : le split screen. Sur la surface de la toile-écran, se côtoient deux séquences presque identiques mais légèrement dissemblables. L’œil du spectateur en alerte alterne entre les deux images à la recherche d’indices narratifs pour combler l’écart temporel. Le trouble qui résulte de ce dédoublement séquentiel n’est pas sans rappeler l’Unheimliche, l’Inquiétante étrangeté freudienne. Cette notion forgée par le psychanalyste en 1919, après sa lecture des Nachtstücke d’Hoffmann caractérise bien les contes que narrent nuitamment Cécile Lempert. Ses arrêts sur image à l’immobilité déroutante sont à la fois séduisants et effrayants, familiers et inconnus, intimes et étrangers. Ils sont le fruit du réel et des rêves...
Enzo Menuge
Cécile Lempert est une peintre allemande née à Dortmund en 1994. Elle vit et travaille désormais à Cologne. Elle a étudié à la Kunstakademie de Düsseldorf auprès de Peter Piller et de Stefan Kürten, et en est sortie diplômée en 2021. Depuis le travail de Cécile Lempert a déjà fait l’objet de plusieurs expositions personnelles en Allemagne : Efremidis, Berlin (2023) ; Baustelle Schaustelle, Essen (2023); AURA Kunstraum, Düsseldorf (2022). Le travail de la peintre aéégalement fait l’objet d’une exposition personnelle à Séoul chez IAH (2022). Cette année marque la participation de l’artiste à deux salons internationaux avec la galerie berlinoise Efremidis : Art Cologne (novembre 2023) et June Art Fair à Bâle (juin 2023). Son travail a été également présenté dans des expositions collectives en Europe et Outre Atlantique : Spazio Musa, Turin ; super-super-markt, Cologne ; AURA Kunstraum, Düsseldorf ; Arttausch Gallery, New York.